Le Vert tue la Vertu

Les indices actions volent de record en record en ce début d’année. Les investisseurs se sont positionnés brutalement sur des stratégies de réouverture des économies avec un appétit frénétique pour les sociétés participant à la reprise d’un cycle dopé aux plans de relance. Ce changement de braquet peut sembler psychédélique car les investissements « responsables » avaient été portés aux nues par toute la communauté financière depuis le début de la pandémie. Désormais, les sociétés « photovoltaïques » ont été vendues massivement pour acheter des sociétés parapétrolières. Mieux encore, les sociétés du secteur de la santé sont arbitrées en faveur d’entreprises produisant des pesticides ou des métaux industriels ! La rotation sectorielle s’effectue à toute vitesse.

Joe Biden va-t-il réellement réussir à faire baisser la température ? Le scénario d’une surchauffe de l’économie américaine n’est toujours pas dans les cours. Les ambitieux plans de relance proposés par les Démocrates portent désormais sur les infrastructures et le capital humain. Ils visent à créer près de 5 millions d’emplois pour soulager une partie des 10 millions d’Américains qui se sont retrouvés sans travail depuis la crise. Pourtant la locomotive américaine semble accélérer à plein régime.  Les indicateurs d’activités dans l’industrie manufacturière atteignent des niveaux historiquement élevés. De nombreux goulots d’étranglement se sont formés, à l’image emblématique du Canal de Suez qui illustre le choc de demande qui se constitue aux Etats-Unis.

De l’autre côté de l’Atlantique, le « diktat sanitaire » englue la croissance de la zone euro. Les stratégies de confinement « stop & start » et les retards dans les campagnes de vaccination s’avèrent lapidaires pour les économies de la vieille Europe. Il faut désormais s’attendre à une valse de révisions à la baisse des perspectives bénéficiaires pour beaucoup de sociétés.  Une fois encore, il ne faut pas sous-estimer l’Europe sur sa capacité à décevoir… et les investissements doivent rester discriminants.

Avec 6,3% de croissance la dynamique américaine vient prendre le relais de la reprise chinoise qui culmine déjà à +8% de PIB. En revanche, les indices actions européens affichent avec insolence des niveaux jusqu’alors jamais atteints lorsque les économistes tentent de calculer l’impact des nouvelles restrictions sanitaires. A défaut de se mettre « au vert », les investisseurs avisés poursuivent leur allocation actions en billets verts. Mais ne condamnez pas trop vite le secteur de la transition écologique. L’urgence climatique restera l’une des préoccupations politiques majeures dont l’enveloppe mondiale déjà votée, au sein des multiples plans de relance, dépasse les 1000 milliards de dollars. Et c’est précisément là, dans cet écosystème de sociétés ayant une « pure éco-activité » qu’il sera possible de séparer le bon grain de l’ivrais, pour unifier la préservation de notre planète avec des performances financières.

La saison des publications de résultats qui débute s’avère cruciale pour confirmer la dynamique des bénéfices des sociétés. Les entreprises ayant une exposition centrée sur la consommation et les services en Zone Euro pourraient rester à la traine tandis que les sociétés positionnées en amont de la reprise, sur les secteurs des semi-conducteurs, les équipementiers manufacturiers ou le lithium par exemple, devraient agréablement surprendre. Les marchés poursuivront leur ascension tant que le pic d’activité ne sera pas atteint. Les voyants sont au Vert, difficile dans ces conditions de ne pas être positionné sur les actions.

 

 

Achevé de rédiger le 8 avril 2021

Guillaume Di Pizio