Le réveil du Panda

En 2017, la société chinoise Panda Green Energy achevait sa ferme géante de Datong Shanxi pouvant générer de l’énergie pour 560 000 foyers et permettant de substituer 330 000 tonnes de charbon. Les sanctions douanières imposées par Donald Trump en 2018 ont révélé les ambitions de l’empire du Milieu de devenir la première puissance mondiale sur le plan économique, technologique et militaire.

A l’instar de beaucoup d’autres sociétés chinoises, Panda Green Energy a vu sa capitalisation fondre de 85%. Les investisseurs se sont mis à fuir les investissements sur la Chine pour des raisons économiques, politiques, sanitaires, règlementaires, écologiques… voire idéologiques.

 

Quelles perspectives de croissance pour la Chine ?

 

La crise du Covid avait touché à ses débuts l’économie chinoise de façon marginale puis a finalement été un catalyseur de sa croissance. La vague omicron a exacerbé la politique « zéro-covid » et a couté très chère à la Chine et au reste du monde. Elle a accentué les tensions sur les chaînes d’approvisionnement et les pressions inflationnistes, mettant en lumière une trop forte dépendance de la planète à la deuxième économie mondiale.

Mais réindustrialiser signifie relocaliser en occident des activités polluantes pour produire à un coût plus élevé au moment où l’inflation et « l’empreinte carbone » sont devenus obsessionnelles. Pour illustrer cette incapacité de compétitivité, les États-Unis viennent de lever leurs droits de douane sur les panneaux solaires provenant d’Asie du Sud-Est. Au final, une substitution même limitée à quelques secteurs stratégiques comme les semi-conducteurs prendra plusieurs années. Et les surcapacités de production industrielle asiatiques exerceront des pressions baissières sur les prix : la Chine exportera à nouveau de la déflation…

Pendant ce temps, la Chine devient de moins en moins dépendante du reste du monde avec la majeure partie de sa croissance réalisée par les dépenses des ménages chinois, la part des exportations ne représentant plus que 35% de son PIB. Sa progression est vertigineuse depuis son adhésion à l’OMC en 2001, à ce moment le PIB chinois ne représentait alors que 12% de la richesse créée aux Etats-Unis.

Aujourd’hui le PIB chinois pèse environ 18000 milliards de dollars, soit les trois quarts de la valeur du PIB américain, alors que sa population est 4 fois plus élevée.

La prime de risque sur les actifs chinois atteint son paroxysme

 

La Chine subit un krach immobilier depuis plus d’un an. En parallèle, le gouvernement chinois a jugulé le contrepouvoir des Tycoons (hommes d’affaires dirigeants des plus grosses multinationales), contraint certains secteurs technologiques ou éducatifs et a mis en place des mesures drastiques de confinements en tétanisant une partie de la population des grandes villes. Difficile d’imaginer une économie ayant plus de contraintes. Résultat, le marché a intégré des chiffres macroéconomiques catastrophiques dans la consommation, le chômage, l’activité manufacturière… La bonne nouvelle c’est que le pays se déconfine et qu’une politique de relance est à l’œuvre ! Le gouvernement fait preuve d’habilité pour stimuler sans insuffler trop d’inflation, c’est pourquoi ce plan porte avant tout sur une relance par l’offre avec 33 mesures, annoncées au mois de mai, dans les domaines fiscaux, financiers, industriels et d’investissements. Le peuple ne sera pas oublié dans les objectifs de « prospérité commune ». Xi Jinping va se représenter après l’été pour un troisième mandat afin d’être élu « président à vie », la paix sociale est un élément indissociable de son succès.

Enfin, l’expansion des variants du covid reste déterminante. Un vaccin ARN messager est actuellement en phase 3 dans les laboratoires chinois. S’il s’avère efficace, l’empire céleste prendra un nouvel envol.

 

Quels supports d’investissement choisir ?

 

Contrairement à l’ensemble des banques centrales, la People’s Bank of China est dans un assouplissement de sa politique monétaire grâce à une inflation très modérée de 2%. Les taux à 10 ans sont restés stables depuis le début de l’année alors que les taux souverains occidentaux sont remontés en flèche entre 1,5% et 2%. Nous sommes acheteurs sur les obligations « Investment Grade » anticipant un resserrement des spreads.

Sur les actions le momentum redevient favorable, les indices ont intégré énormément de risque en ayant corrigé sur leurs supports long-terme. La valorisation de 12 fois les bénéfices 2023 est très attractive contre un PER de 16 calculé sur la moyenne des 15 dernières années.

Les actions peuvent être jouées soit via des investissements directs ADR sur Alibaba ou Tencent ou des trackers géographiques. L’exposition chinoise peut être réalisée de manière indirecte en identifiant les valeurs réalisant une majeure partie de leur chiffre d’affaires en Asie : cela s’adresse aux secteurs du Luxe (Kering, Hermès) des matières premières (Rio Tinto), de la technologie (Nvidia, voire de l’automobile (Mercedes).

 

Le marché a effacé la bulle de liquidité qui avait porté aux nues nombre de sociétés du « monde d’après ». Les très médiatisés Jamie Dimon (JP Morgan) et Elon Musk (Tesla) ont alarmé les masses avec des prévisions cataclysmiques. La peur est mauvaise conseillère. Les regards sont tournés vers les pays victimes de la stagflation, à l’orient l’aube se lève avant l’heure. Le cycle économique chinois est désynchronisé depuis la crise du Covid. Comme dit le proverbe « à qui sait attendre, le temps ouvre ses portes ».

 

 

Guillaume Di Pizio

achevé de rédiger le 08/06/2022