La FED à la recherche de « Boucle d’Or »

Qu’il semble loin le temps où les marchés étaient dans un mouvement de reprise, accompagné du soutien inconditionnel des politiques monétaires et budgétaires ; une période idyllique pour l’investisseur dite « Goldilocks ».

Renforcée par l’absence de visibilité géopolitique et économique, la persistance de l’inflation a pris à revers les banquiers centraux, désormais contraints de naviguer « à vue ». Hantés par le spectre de l’hyperinflation des années 1930, les banquiers centraux veulent à tout prix combattre la hausse généralisée des prix en remontant énergétiquement les taux directeurs, quitte à sacrifier la reprise : mais jusqu’où vont-ils aller ?

La Réserve Fédérale, accusée d’avoir agi trop tardivement, doit préserver coûte que coûte sa crédibilité, communicant sans cesse sur un durcissement monétaire inflexible tant que la locomotive américaine ne freine pas davantage. Les marchés sont plongés dans une situation kafkaïenne : les indicateurs attestant de la bonne vitalité économique présentent un risque de surchauffe et les chiffres plus mitigés comme ceux de l’immobilier, de la confiance des consommateurs, de la dépense des ménages, militent pour un ralentissement de la croissance. Finalement, les bonnes nouvelles économiques sont de mauvais augure pour les marchés, et inversement. Les investisseurs se retrouvent, comme Boucle d’Or, à goûter à une soupe en espérant qu’elle ne soit ni trop chaude, ni trop froide.

Pire, Jérôme Powell se focalise sur des indicateurs d’emploi publiés à posteriori, ne lui permettant pas de faire des projections à moyen terme. Les indicateurs « avancés » (comme les directeurs d’achats ou celui des carnets de commandes des entreprises) sont jugés trop volatils et pourraient lui faire commettre des erreurs d’ajustement monétaire…

La FED est sortie de son double mandat qui est la surveillance de l’inflation et du maintien du plein emploi. Les tensions sur le marché du travail propulsent le chômage américain à 3,5%, soit son plus bas taux depuis 1969. Presque 2 offres d’emploi par chômeur alimentent la hausse des salaires, créant une inflation de « deuxième tour », plus durable. C’est le combat affiché des grands argentiers pour mettre un terme à cette spirale.  In fine, cette politique monétaire aura un effet auto-réalisateur. Le pilotage d’un atterrissage de l’économie américaine mettra un terme à l’inflation.

Si les banques centrales restent le principal catalyseur des marchés financiers, la recherche de Boucle d’Or a fait surgir les trois ours (bear market) qui pressurisent les valorisations boursières. Après presque onze mois consécutifs de baisse sur les actions américaines, la « bulle Covid » a éclaté. En un an, les marchés sont passés d’un scénario de reprise à celui de la stagflation, puis à celui de la récession. Ils ont cristallisé une grande partie de cette folle période d’hystérie énergétique ! Les derniers ajustements s’effectueront sur la publication des résultats des sociétés du troisième trimestre. La volatilité va créer de belles opportunités sur les actifs de qualité ; car lorsque l’activité économique touchera son point bas, les marchés auront déjà anticipé son rebond. Comme le dit l’adage, « un marché haussier ne peut se construire que sur un mur de craintes ».

 

achevé de rédiger le 10/10/2022

Guillaume Di Pizio