Je retourne ma veste…toujours du bon côté !
Quelle fin d’année spectaculaire. Alors que le mois d’octobre revêtait des airs de fin du monde avec une inflation collante, la sinistrose manufacturière, l’envolée du coût de la dette, l’arrêt complet de la Chine, l’attaque du Hamas… Il n’en fallait pas plus pour déprimer les investisseurs à qui les plus grands bureaux de recherche vendaient l’idée depuis plus d’un an, que trimestre après trimestre, le monde allait entrer en récession. Mais voilà, sans même le savoir eux-mêmes, les banquiers centraux allaient retrouver leur statut de “gardiens de la galaxie”, en libérant la planète de la hausse des prix et de la surchauffe du marché du travail.
Les marchés sont restés focalisés sur le principe « bad news is good news ». Ce paradoxe provient d’une relation simple : si l’économie ralentit lentement mais sûrement : « bad news », alors les Banques Centrales assouplissent leur politique monétaire ; « good news ». N’oublions pas que le double mandat de la Réserve Fédérale est la surveillance de l’inflation et du plein emploi. Les chiffres d’inflation ayant fléchi à l’instar des créations de postes, les investisseurs parient désormais sur une baisse ultra-agressive de la FED. Alors que l’ensemble des gouverneurs se sont prononcés sur un éventuel assouplissement en seconde partie d’année 2024, les investisseurs anticipent déjà avec 62% de probabilité une baisse de taux en mars prochain et à 97% au mois de juin ! Après avoir connu en envolée historique du 10 ans américain de 125 points de base en deux mois pour porter le T-Bill à presque 5% de rendement, le mois de novembre a été le témoin du plus grand retournement de tendance avec une baisse de 85 points de base (plus de 8% de hausse du prix de l’emprunt fédéral sur un mois). C’est juste colossal. Certes, le coût de la dette avait atteint un seuil de douleur sur les crédits auto à plus de 9% ou les crédits consommation à chaque fois qu’un ménage américain dégaine sa carte de crédit à plus de 22%… L’économie réel était jusque-là bien impactée par la hausse des taux. Aujourd’hui, la perspective d’une pause, voire une potentielle baisse des taux directeurs, est comme proposer une nouvelle dose a un malade sevré depuis des mois. Toutes les classes d’actifs ont profité de ce rallye obligataire : les actions avec les sociétés les plus délaissées, pour ne pas dire les plus endettées, qui ont opéré leur “pull back”, le compartiment High Yield (obligations à haut rendement), mais aussi les matières premières parmi lesquelles l’once d’or a atteint un niveau jamais atteint, les valeurs foncières et même les cryptomonnaies. La liquidité était morte, vive le retour de la liquidité.
Est-il raisonnable que ce mouvement puisse se poursuivre ? Nous avons la faiblesse de penser que OUI. En premier, lieu parce que le marché avait pris une posture très manichéenne en privilégiant les méga-capitalisations technologiques américaine, le luxe ainsi que quelques autres cas particuliers, tout en délaissant 90% de la côte qui a été outrageusement sous-valorisée, pour ne pas dire matraquée. Ainsi, ce rééquilibrage brutal aura pour effet de réduire la prime de risque de ces actifs. Ensuite, parce que, sans espoir ni confiance, la croissance n’existe pas. En 2024, 40% des pays démocratiques vont être appelés à voter avec, sur le devant de la scène, les élections américaines. Et là, les statistiques sont formelles : au cours de 83% des années électorales, l’indice S&P500 affiche une hausse, porté par les promesses électorales stimulant l’investissement des entreprises et le moral des ménages. Les 3 années où l’indice phare de l’oncle Sam n’est pas monté était en 1940, le début de la seconde guerre mondiale, 2000, l’éclatement de la bulle internet et 2008, la crise des subprimes. Ainsi, les investissements à court terme seront fléchés vers les véhicules les plus sensibles à l’amélioration des conditions de crédit.
En cette folle fin d’année, où les paillettes de noël ont tant de mal à se glisser dans nos yeux, n’ignorons pas la magie du Momentum car le vielle adage annonçant qu’un “marché haussier ne peut se construire que sur un mur de crainte” pourrait se réaliser une nouvelle fois.
Achevé de rédiger le 12 décembre 2023
Guillaume Di Pizio