Jay in the Box

L’année 2023 a été particulièrement éprouvante pour les investisseurs. Les anticipations des grands bureaux de recherche économique et des institutions internationales n’ont eu de cesse de marteler que la récession allait intervenir à la fin de chaque trimestre. De leur côté, les banquiers centraux sont restés très fermes dans leur décision de maintenir un niveau des taux directeurs très élevé face à une inflation qui peine à fléchir. Cette invitation à la plus grande prudence s’est accompagnée d’une envolée des taux souverains alors qu’ils s’étaient déjà copieusement tendus en 2022. Pour couronner le tout, l’ensemble du secteur bancaire avait resserré drastiquement la distribution de crédit tant à cause de la flambé des taux d’intérêt que des faillites des banques commerciales américaines dès le mois de mars qui a conduit à un durcissement de leur réglementation. Cette restriction de l’octroi de crédit pèse sur l’investissement des entreprises, heureusement les ménages ont pu puiser dans leur épargne pour pouvoir continuer de consommer. En conséquence, le marché actions s’est complétement disloqué où toutes les sociétés ayant besoin de financer leur croissance ont été massacrées tandis que les faveurs étaient portées aux thématiques liées à l’Intelligence Artificielle incarnée par les « sept magnifiques » méga capitalisations américaines (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft, Nvidia et Tesla) et les valeurs du Luxe jugées comme « intemporelles » …

Surprise fin octobre, le « diable sort de sa boite » : l’inflation recule plus vite que prévu aidée par la baisse du prix du pétrole et le président de la Réserve Fédéral, Jerome Powell, laisse (enfin !) entendre que le cycle de hausse de taux est achevé. Ce discours engendre des anticipations très agressives de baisse de taux. Les marchés rétropédalent à toute allure, les actifs délaissés ayant une prime de risque excessive, connaissent un rebond fulgurant. Une singularité prend forme entre la dégradation progressive de l’activité économique avec notamment une récession qui se confirme en zone euro face à une rebond spectaculaire des valorisations boursières.

Et maintenant, qu’attendre de 2024 ?

L’équation « rose » envisagée par le marché, cumulant un atterrissage en douceur de l’économie, un ralentissement de l’inflation et de nombreuses baisses de taux directeurs, semble irréaliste. Soyons pragmatiques, s’il n’y a pas de récession donc il n’y a pas d’urgence à baisser les taux. D’autant que le retour à une politique monétaire accommodante s’accompagnera de la réduction de la taille du bilan des banques centrales pour reconstituer une marge de manœuvre.

Le casse-tête de la zone euro sera de piloter conjointement le ralentissement économique et la rigueur budgétaire. De ce point de vue, une « alerte » sur les emprunts d’Etats pourrait se matérialiser en Italie. La Chine semble engluée dans la gestion de la crise immobilière et de l’intensification des sanctions commerciales, limitant les exportations Allemandes et Italiennes. Le différentiel de croissance entre les différentes zones va perdurer tout au long de l’année. L’Europe va continuer à glisser dans une « récession molle » tandis que les Etats-Unis vont réserver leur lot de bonnes surprises. Le tissu économique bénéficiera du retour du canal du crédit et les élections en novembre pourraient être un catalyseur supplémentaire même si la FED ne réussira peut-être pas à sauver le soldat Biden.

 

Achevé de rédiger le 12/01/2024

Guillaume Di Pizio